28 octobre 2020 500 Vue(s)

Destinataires :
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N°77 du 27 octobre 2020
Seconde réunion de la Conférence du dialogue social
La seconde réunion de la Conférence du dialogue social s’est tenue le lundi 26 octobre à Matignon en présence du Premier Ministre, des Ministres de l’Economie et du Travail ainsi que du Secrétaire d’Etat chargé des retraites et de la santé au travail. La CFDT était représentée par Laurent Berger, Secrétaire général et Yvan Ricordeau, Secrétaire national.
Prévue à l’origine comme un point d’étape des chantiers de l’agenda social décidé le 17 juillet, cette réunion a été marquée par le contexte dégradé de la crise sanitaire. Le discours introductif du Premier Ministre, empreint de gravité, a dès le début parlé d’une situation très difficile, qui s’aggrave. Il n’a pas caché que les dernières mesures restrictives prises ne seront pas suffisantes et qu’au vu de la situation difficile dans les établissements de soins, d’autres dispositions seront à prendre. Cet état de fait aura des répercussions négatives sur l’économie et le social. Il faut aussi mesurer l’enjeu psychologique important que cela engendre sur les personnes et sur la société. Le gouvernement en appelle à l’unité la plus large, c’est pour cela qu’avant toute décision sur de nouvelles mesures, une concertation sera faite avec l’ensemble des acteurs – les partenaires sociaux seront de ce fait associés.
A plusieurs reprises, la nécessité d’avoir un dialogue social de qualité aux niveaux de l’entreprise, des branches et interprofessionnel a été affirmée. L’engagement à continuer les mesures d’accompagnement des salariés et des entreprises a conclu ce propos.
La réunion a permis de faire un premier point d’étape des chantiers de l’agenda social, celui-ci devant être aménagé en retenant de façon prioritaire la lutte contre la crise sanitaire et ses conséquences économiques et sociales.

La Ministre du Travail a fait le point sur 3 dossiers :
Le Plan Jeunes. Le gouvernement est satisfait des premiers résultats du plan jeunes. Sa gouvernance serait installée dans toutes les régions. Le nombre d’embauches de jeunes de moins de 26 ans est en augmentation à la rentrée et le nombre d’entrées en apprentissage serait proche de celui de la rentrée 2019. La dynamique des mesures « 1 jeune, 1 solution » est plus contrastée : les entrées en garantie jeunes sont en retard mais les dispositifs Pacéa et Pec ont de meilleurs résultats.
L’APLD. 3600 entreprises ont négocié un accord APLD représentant plus de
200 000 salariés. 5 accords de branche ont été conclus, 20 sont encore en
négociation. 75% de ces accords concernent des entreprises de moins de 50
salariés. Il convient de s’intéresser de près au volet formation et il a été annoncé la prolongation jusqu’au 31 décembre du dispositif particulier APLD à 100% pour les secteurs particulièrement impactés.
Les transitions professionnelles collectives. Fruit de la concertation avec les partenaires sociaux, un dispositif nouveau permettra de soutenir des reconversions professionnelles dans des secteurs fortement impactés par la crise vers des métiers dans des secteurs plus porteurs. Le dispositif bénéficiera d’un soutien financier variant de 40% à 100% des coûts de rémunération et de formation en fonction de la taille de l’entreprise. La gestion de ce dispositif sera confiée aux partenaires sociaux.
Le Ministre de l’Economie a fait une présentation de l’impact économique hétérogène de la crise sur les secteurs d’activité. Il a présenté la stratégie du gouvernement visant à protéger et à opérer une relance de façon simultanée en prenant l’engagement que cela durerait autant que nécessaire, y compris si cela nécessite des efforts budgétaires supplémentaires. Un point de situation a été effectué sur le niveau des prêts garantis aux entreprises, le montant des fonds propres, le recours au fonds de solidarité, la question des loyers des entreprises, le fonds de relocalisation, les engagements sur la rénovation thermique et l’articulation avec le niveau européen.

La CFDT est intervenue sur l’ensemble des dossiers évoqués mais elle n’a, au préalable, pas éludé le contexte sanitaire dégradé de la période. Cela engendre des conséquences sociales et économiques mais aussi psychologiques et démocratiques qu’il faut prendre en compte car le pays n’est pas dans la même situation qu’au mois de mars. Tout en reconnaissant les décisions prises pour protéger les emplois et relancer l’économie, l’unité demandée se construira s’il y a aussi solidarité, clarté et responsabilité. La CFDT a donc clairement demandé qu’une concertation soit menée
avant l’annonce de toute nouvelle mesure.
En cohérence avec cette exigence de concertation, la CFDT a adressé une alerte sur la nécessité de maintenir le dialogue et l’information des organisations syndicales et patronales quant aux dispositions susceptibles d’être adoptées par ordonnances alors que le projet de loi prorogeant l’état d’urgence est en cours de discussion au Parlement. Cette vigilance porte notamment sur les sujets concernant le dialogue social en entreprise, le dialogue social de branche et les mesures relatives à la durée du travail et aux congés payés.
La CFDT partage les constats positifs sur le plan jeunes en mettant l’accent sur la nécessité de renforcer dès maintenant les moyens des Missions locales, et en attirant l’attention sur la situation des jeunes diplômés de moins de 26 ans qui ne sont pas éligibles aux dispositifs en place.
La CFDT salue la dynamique enclenchée avec les négociations APLD et demande à ce que le volet formation soit plus pris en compte.
Le nouveau dispositif de transitions professionnelles collectives est une avancée, c’était la revendication prioritaire de la CFDT dans le volet compétences du plan de relance. Le gouvernement reprend ainsi à son compte une proposition construite par les partenaires sociaux. La CFDT s’en réjouit mais demande une amélioration de la prise en charge des coûts de rémunération et de formation restant à la charge des entreprises.
Au vu du contexte, la CFDT a redit l’importance que la négociation sur le télétravail fixe un cadre clair pour les entreprises. De la même façon, l’attente sociale est très forte sur la reconnaissance des travailleurs dits de la 2nde ligne. Il faut que le travail sur ces questions avance vite.
La CFDT a principalement alerté le gouvernement sur l’application de la réforme prévue de l’assurance chômage au 1er janvier 2021. Celle-ci conçue dans un contexte économique porteur était déjà injuste, elle n’a plus aucun sens dans le contexte actuel. Les salariés qui perdent leur emploi en 2020, souvent les plus précaires, seraient ceux qui verraient leur indemnisation baisser en 2021. La CFDT se servira de la concertation en cours pour faire la démonstration, à travers les travaux de l’étude d’impact, que cette réforme est à contre-emploi, afin qu’elle ne s’applique pas.
Après avoir souligné notre attente sur les résultats de la mission Frouin sur la situation des travailleurs des plateformes, la CFDT a conclu son intervention sur la question de la qualité du dialogue social. Le comité de suivi et d’évaluation des ordonnances travail a fait un bilan intermédiaire, peu encourageant sur la qualité du dialogue social en entreprise. Or, dans la période, c’est un enjeu crucial. Sans revenir sur l’essence même de ces ordonnances, la CFDT a des propositions d’évolution en ce qui concerne une meilleure prise en charge des enjeux de santé au travail, une meilleure représentation de proximité… La CFDT a donc expressément demandé à ce que cela fasse l’objet d’échanges spécifiques.

Les organisations patronales ont toutes alerté l’exécutif sur la prise en compte de la situation actuelle des entreprises avant de renforcer les mesures de réponse à la crise sanitaire. Elles envisagent un durcissement des protocoles existants, une augmentation du télétravail mais veulent éviter toute forme de confinement au vu de l’endettement et des fragilités économiques des entreprises.
Elles ont globalement soutenu les mesures du plan jeunes et le dispositif de
transitions professionnelles et plaidé pour un étalement du calendrier pour les autres sujets.
Les organisations syndicales ont toutes inscrit leurs interventions en ayant
conscience des problèmes sanitaires tout en alertant sur le fait que la société et les entreprises n’étaient pas dans la même situation qu’en mars 2020. Elles ont globalement demandé que la négociation sur le télétravail avance plus vite et fixe un cadre clair. L’accent a été mis sur la reconnaissance des travailleurs de la 2nde ligne et sur les transitions professionnelles. Toutes ont demandé l’abandon de la réforme
de l’assurance chômage.
En conclusion de la réunion, le Premier Ministre a insisté sur la méthode à employer pour gérer la situation, estimant que le dialogue social était plus que jamais nécessaire à tous les niveaux. Reconnaissant le problème d’information sur le contenu de la prolongation de la loi sur l’état d’urgence, il s’est engagé à essayer de consulter les partenaires sociaux sur les mesures et dispositifs en découlant.

En s’appuyant sur le fait que la France soit un des pays qui fait le plus en matière de protection des entreprises et de l’emploi, il a insisté sur :

  • La nécessité de porter le télétravail au maximum dans l’organisation des entreprises ;
  • Reprendre un suivi très précis des situations des entreprises et secteurs en difficulté ;
  • Trouver une réponse aux jeunes non couverts aujourd’hui par les dispositifs ;
  • Déployer rapidement les transitions professionnelles collectives ;
  • Retenir 2 priorités dans le cadre du travail avec les partenaires sociaux pour trouver des réponses pour les travailleurs indépendants et avancer sur la reconnaissance des travailleurs de la 2nde ligne en lançant une mission (les autres sujets sont décalés sur 2021) ;
  • Décaler l’application de la réforme de l’assurance chômage de 3 mois tout en continuant la concertation pour l’aménager ;
  • Continuer le déploiement du plan de relance.

La CFDT a été informée quelques heures après cette réunion qu’une nouvelle rencontre avec le Premier Ministre aurait lieu le mardi 27 octobre dans la soirée afin de consulter les partenaires sociaux sur le durcissement des mesures pour faire face à la crise sanitaire.

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