06 juin 2020 841 Vue(s)

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Jeudi 4 juin, le Président de la République a réuni les organisations syndicales et patronales à l’Elysée pour lancer une mobilisation pour l’emploi.


Le Président a ouvert la réunion en faisant état d’un choc économique et social sans précédent. Il a insisté sur la nécessité de préserver l’emploi et le tissu productif en faisant le choix de l’engagement collectif par le dialogue social dans les entreprises et les branches.


Le Président de la République a ensuite développé 3 sujets :

SUJET 1

L’activité partielle : il a annoncé la création d’un dispositif d’activité partielle longue durée soumis à accords de branches et d’entreprises. D’ici mi-juin les partenaires sociaux sont invités à en définir les paramètres. A défaut d’accord, l’Etat les définira. Il a insisté sur trois sujets complémentaires à travailler : rééquilibrer le rapport donneur d’ordre/sous-traitant par des accords de branche, réguler le travail détaché, prévoir des mesures spécifiques pour les indépendants.

SUJET 2

L’apprentissage : il sera mis en place une aide unique à l’embauche pour maintenir le nombre d’apprentis. D’ici mi-juin, le Gouvernement fera des propositions aux partenaires sociaux, qui sont invités à formuler des propositions pour soutenir l’emploi des jeunes.

SUJET 3

L’assurance chômage : au vu du contexte, le gouvernement veut revoir les règles régissant l’assurance chômage et notamment les règles d’affiliation. D’ici fin juin, les dispositions de la réforme en cours feront l’objet de discussions.
Le Président a terminé son introduction en appelant à la responsabilité partagée de tous les acteurs. Il a appelé les organisations syndicales et patronales à assumer la leur en s’engageant dans ce pacte de confiance.
La CFDT, par la voix de Laurent Berger, est revenue sur la période passée en actant positivement l’activation des mécanismes d’activité partielle et de soutien social. La CFDT a également demandé :
• La fin des mesures spéciales prises dans les ordonnances dès la fin de l’état d’urgence sanitaire pour revenir aux règles antérieures et à de la concertation sociale normale ;
• La nécessité de ne pas oublier les travailleurs en 1ère et 2ème ligne en termes de reconnaissance salariale et professionnelle ;
• La publication urgente du décret permettant la reconnaissance du covid-19 en maladie professionnelle pour les salariés touchés.
La CFDT a ensuite fait part de ses 12 propositions pour « travailler tous, travailler mieux » (en annexe à cette info rapide) et a ajouté les points suivants :
• Les aides à l’apprentissage doivent être des aides à l’alternance et couvrir donc également les contrats de professionnalisation.
• Il faut des mesures spécifiques pour les travailleurs saisonniers.
• Il ne faut pas oublier les travailleurs en insertion en faisant vivre le pacte insertion.
• Il faut aller plus loin au niveau européen sur le travail détaché, notamment dans le secteur des transports.
• Il faut aller plus loin sur la responsabilité des entreprises.
Après la présentation de nos propositions, la CFDT a affirmé sa volonté de s’engager dans une mobilisation sur l’emploi, à condition que cela se fasse dans la transparence, la loyauté et la confiance.


Positionnement des autres organisations syndicales
La CGT s’est montrée peu encline à s’engager. Elle demande un changement de modèle sans en définir les contours.
FO a demandé l’ouverture d’une négociation sur l’assurance chômage entre partenaires sociaux, sans intervention de l’Etat. Elle est favorable aux mesures proposées sur l’activité partielle à condition que les salaires soient augmentés.
La CGC a salué les mesures de chômage partiel prises durant le confinement et s’est engagée à participer aux concertations. Elle a demandé à ce que des contreparties soient imposées aux entreprises qui perçoivent des aides publiques. Elle a demandé l’annulation de la réforme de l’assurance chômage et s’est opposée à des négociations tripartites.
La CFTC appelle à de nouvelles mesures de confiance sur l’emploi et a plaidé pour une montée en gamme, plutôt que la poursuite d’une « stratégie de low cost ». Elle est prête à s’engager dans cette mobilisation collective.
L’UNSA est partante pour un pacte de protection de l’emploi mais a exprimé une vigilance : ne pas revenir au contrat première embauche. Elle est d’accord pour prendre part à des négociations tripartites.
Le MEDEF a salué les mesures de soutien aux entreprises. L’activité reprend mais reste très en deçà de l’année précédente (-20 %). Il demande à ce que le chômage partiel perdure au moins jusqu’à la rentrée. Il est d’accord pour discuter de l’activité partielle de longue durée avec les organisations syndicales et s’est dit prêt à s’engager dans des accords d’entreprise. Il ne plaide pas pour des baisses de salaires. Le Medef a proposé la mise en place d’une aide à l’embauche de jeunes sans impact sur leur salaire. Il a annoncé vouloir jouer le jeu de l’intérêt général en sortant de nos modèles historiques.
L’U2P a rappelé le risque particulier que courent les petites entreprises dans cette crise et a demandé un plan sectoriel pour les indépendants.
La FNSEA a demandé à ce que la loi agriculture et alimentation s’applique.

Réponse du Gouvernement
La ministre du Travail a proposé 4 mesures pour répondre à la forte demande des jeunes en matière d’apprentissage : une prime exceptionnelle à l’embauche des jeunes en CAP jusqu’à bac + 3 (3 500 euros pour les moins de 18 ans et 8000 euros pour les autres) ; l’engagement des entreprises de plus de 250 salariés à atteindre 5% d’apprentis ; la possibilité pour les jeunes qui n’auraient pas trouvé d’entreprises de rester 6 mois de plus en CFA ; une mobilisation dans les territoires pour aider les jeunes à trouver un emploi par la création d’une plateforme des demandes et un soutien numérique pour les jeunes apprentis.
La ministre a rappelé le besoin de mettre en place un mécanisme d’activité partielle de longue durée après accord des partenaires sociaux. Pour en définir les curseurs, la concertation avec les partenaires sociaux devra aboutir dans les 8 jours. Il faudra aussi définir les conditions de la pérennité de l’activité partielle (niveau, date …).
Concernant l’emploi des jeunes, une concertation devra permettre d’aborder les nombreux sujets : stages, primo demandeurs, saisonniers ….
La ministre du Travail a rappelé que le temps de chômage partiel doit être utilisé pour former les travailleurs. La formation doit être orientée vers les secteurs où il y a des besoins comme les services à la personne. Elle a aussi dit avoir une vigilance particulière à poursuivre les actions sur l’insertion.
Le débat sur les travailleurs détachés doit être mené au niveau européen pour que le coût soit le même en intégrant non seulement le salaire mais aussi la protection sociale.
Le Covid-19 sera reconnu comme une maladie professionnelle pour le personnel soignant et des EHPAD. Pour les autres travailleurs, il sera mis en place un système de reconnaissance individuel par les comités régionaux des maladies professionnelles qui entraînera une prise en charge pour le salarié qui aurait subi une perte de revenu ou aurait des séquelles, ou pour ses ayants droits en cas de décès.
Une nouvelle réunion est fixée lundi pour aborder les sujets emploi.
Le ministre de l’économie et des finances a dit qu’il resterait vigilant quant à la situation des entreprises. L’activité du site Maubeuge de Renault sera maintenue. Pour soutenir l’activité, différents plans de filières seront déployés (tourisme, automobile, aéronautique …) et des mesures spécifiques pour les indépendants seront prises. Cet investissement s’élèvera à 40 milliards d’euros.
Le financement européen pour la France sera présenté mercredi. A la rentrée, le gouvernement présentera un plan de relance et les partenaires sociaux seront associés aux choix qu’il faudra faire pour soutenir l’économie française.
Le ministre de l’économie et des finances a souligné quelques objectifs : décarbonisation de l’économie pour une relance verte, meilleure coopération entre les donneurs d’ordre et les sous-traitants, relocalisations tout en restant compétitifs.
Le Premier ministre, a salué le travail des agents qui a permis à l’Etat de s’adapter. Il a rappelé la gravité de la situation : même si le redémarrage était rapide il y aura des dégâts. Il faut réagir vite. Le Premier ministre a dit que les solutions de cette crise n’étaient pas purement françaises. Nous devons prendre en compte des contraintes qui vont continuer à s’exercer : la compétitivité, le financement dans la durée, les relations commerciales. Il a terminé en disant que tous doivent être dépositaires de l’intérêt général.
Le Président de la République a conclu cet échange en précisant que nous sortons de la phase de résistance au choc pour entrer dans une phase de résilience et de reprise perturbée par de nouvelle règles et de nouveaux comportements. Sans savoir combien de temps durera cette phase, il faudra limiter les faillites et maintenir l’emploi et les compétences. Il faut, dans les 15 jours, équilibrer l’activité partielle de longue durée et maintenir l’activité partielle classique dans certains secteurs. Il faut trouver les bons outils pour les branches et les entreprises, favoriser le dialogue et construire la confiance. Il faut bâtir des solutions pour les jeunes. Un nouveau rendez-vous doit être fixé dans 15 jours pour mettre en oeuvre ces dispositifs.
Sur le plan de relance, le Président de la République a exprimé sa volonté d’avancer vers plus de souveraineté économique (industrielle, alimentaire …). Il a exprimé une ambition écologique qui questionne notre modèle de production.
Au vu des changements profonds à venir, le Président a dit la nécessité de dialogue permanent.

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